La crème de vie
Je me souviens du petit-déjeuner de «tortillas avec de la crème fraîche et du sel». C’était la première fois que j’y goûtais. Je viens du Québec, terre de l’érable. Je me souviens d’une tranche de pain frais de ma mère tartinée de crème fraîche et saupoudrée de sucre d’érable ou de cassonade. Juste le souvenir et le goût revient immédiatement. Ensuite, à des fins d’hygiène, la loi a empêché les agriculteurs de vendre la crème fraîche qui remonte dans le seau après la traite des vaches. En fait, les agriculteurs ne voient plus le lait. De la trayeuse attachée aux pies de vaches, en passant par le lactoduc jusqu’au réservoir puis au camion pour ensuite arriver à la boîte sur notre table. À travers la série de tuyau, un goût a disparu, le laissant dans les souvenirs de quelques survivants encore. Et avec la mondialisation, il fait certainement partie des goûts en voix de disparition.
Aujourd’hui nous savons, le choix était également meilleur pour notre santé. Mais maintenant, ce sont les produits chimiques dans la nourriture des vaches qui traversent les tuyaux et se retrouvent dans la boîte sur notre table. Le lait n’est plus du lait.
Transportée par un goût de Bosnie au Nicaragua
Au Nicaragua, je goûtais encore la crème, mais cette fois, avec du sel. J’ai beaucoup aimé et d’une tortillas à une autre, il était difficile d’arrêter. Un petit déjeuner qui devait rester dans mon esprit pour toujours. (Tel celui deKiribati et de Grenade). J’ai voyagé en me rappelant et puis un jour, le goût est revenu. Je prenais le petit-déjeuner en « Bosnie ». Ce n’était pas des tortillas, mais du pain frais maison avec de la crème fraîche de la traite de la veille et saupoudrée de sel. Là, assise dans la cuisine d’été dans les montagnes qui entourent Sarajevo, mon esprit est retourné au Nicaragua. En Bosnie, nous ne savions pas, mais ils étaient à deux semaines de leur propre guerre.
Combien de guerres ont effacé la crème de la vie à tant de personnes sur terre?
Ma liberté et la dictature
L’Amérique du sud et l’Amérique centrale ont contribué à mon réveil politique.Un début avec le livre Les veines ouvertes de l’Amérique latine par Eduardo Galeano et le Chili et l’Argentine les premiers pays visités. Il ne fallu que ça pour réaliser que j’étais révolutionnaire. Je réalisais que si j’étais né dans ces pays, j’aurais probablement été tué pour avoir pris la parole. Mais on m’aurais probablement enseigné le silence différemment que dans les pensionnats. Les pensées sur ma liberté furent re-examinées et il me fut difficile de parler de celle-ci dès le début de ce projet. La liberté est fragile mais ça l’est encore plus d’en parler à ceux qui vivent dans une dictature. J’allais la vivre discrètement à l’avenir.
L’effet de la guerre sur la vie quotidienne
Au Nicaragua, je voyais l’effet de la guerre sur la vie quotidienne. C’était si vrai, si réel quand la maison tremblait en fin d’après-midi et que les hélicoptères militaires descendaient se stationner tout près pour la nuit.
Au Nicaragua, je voyais l’effet de la guerre sur la vie quotidienne. C’était si vrai, si réel quand la maison tremblait en fin d’après-midi et que les hélicoptères militaires descendaient se stationner tout près pour la nuit. Il était si impressionnant de se rendre compte que tous les jeunes de la maison étaient prêts à se battre. Comment la destinée était jouée chaque matin alors qu’ils étaient tous assis autour de la radio. Un seul appel du gouvernement «nous avons besoin de vous tous» et Lucia aurait perdu les adolescents de la maison.
Le viol de l’esprit d’un pays
Après, le colonialisme vint l’impérialisme qui est une forme de viol. Celui de l’esprit d’un pays. Ce matin-là, au Nicaragua, je me suis demandé si je prendrais les armes pour mon pays, pour la paix et pour ma liberté. Pourrais-je laisser mes enfants partir en guerre à quatorze ans? Mais aurais-je le choix? Maintenant, je sais que lorsque les enfants veulent aller à la guerre à un tel âge, c’est parce qu’ils ont probablement raison dans leur désir.
Lucia m’a parlé de son fils qui est mort pendant la guerre: « Il a estimé qu’il était de son devoir de partir. Alors, je l’ai laissé. »
Il y a des histoires et des personnes qui restent avec vous toute votre vie et Lucia et sa famille est de celles-là.
Y auraient-ils des guerres sans les jeunes? N’est-ce pas aux jeunes de prendre la paix en mains? Sinon, où est la paix?
A part la première et la second guerre mondiale y a-t-il jamais eu une raison justifiable à toute l’humanité pour les Américains d’aller tuer des êtres humain en dehors de leur territoire?
Aujourd’hui c’est pour l’intérêt de l’Humanité que l’on agit.